Henri Likoko, un amoureux des journaux
Très actif, Henri passe sa journée à vendre les journaux dans les administrations et les bars de Kisangani. Passionné par son travail, on le voit sous le chaud soleil ou sous la pluie chercher son pain quotidien.
Henri fait ce métier depuis près de 40 ans. Grâce à son expérience, il sait redonner à certains de ses clients le goût de lire. «Je commence par expliquer aux gens l’importance de la lecture. Je leur donne en bref les sommaires pour susciter l’achat». «Vendre les journaux est toute sa vie. Sa manière de le faire est exceptionnelle», dit de lui un de ses patrons, le représentant de La Référence plus en Province orientale, Gilbert Risasi.
Porté par l’amour de son métier, Henri subvient à ses besoins et à ceux de sa famille : «J’ai commencé à vendre les journaux Mambenga, édités par Albert Bosange, à Mbandaka, en 1970». Il poursuit : «Lorsque je suis arrivé à Kisangani en 1974, j’ai continué à travailler avec lui. A cette époque, je pouvais écouler des centaines de journaux par jour. Aujourd’hui, j’arrive rarement à en vendre 20 par jour.» Gilbert Risasi explique cette «baisse de la culture de lecture des journaux par la mauvaise situation socio-économique et politique de la population congolaise en général et boyomaise en particulier».
Des clients mauvais payeurs
«Dans les années 1990, les services publics et privés tels que la Société nationale d’électricité, la Société textile de Kisangani ou la Regideso avaient un budget réservé à l’achat des journaux», précise le représentant du journal Les Coulisses et secrétaire de l’Union nationale de la presse congolaise en Province orientale, Norbert Kisanga. Il rappelle ensuite : «Dès réception de 400 exemplaires du journal kinois Umoja, à l’époque, je distribuais directement auprès de mes abonnés. J’attendais deux jours pour finaliser le recouvrement. A l’heure actuelle, ce dernier peut prendre jusqu’à deux semaines à cause du pouvoir d’achat extrêmement faible».
Henri fait donc face à différentes difficultés : «Certains clients mettent beaucoup de temps pour payer. D’autres ne payent même pas lors de la vente à crédit…» Il poursuit : «J’ai parfois été menacé, car j’écoulais des journaux renfermant un dossier chaud, qui dénonçait une manœuvre d’une autorité politico-administrative ou d’un parti politique». Pas de quoi décourager cet homme brave et droit. «Henri Likoko est un homme digne et honnête. Il a un courage exceptionnel. Lors de la rébellion de 1999 et l’occupation des forces ougando-rwandaises, il a refusé de me dénoncer. J’avais écrit un article sur le monopole du diamant. Ses agresseurs lui avaient pourtant proposé de l’argent pour qu’il leur donne mon identité», se souvient, encore admiratif, Norbert Kisanga.
Tourné vers l’avenir, Henri Likoko explique : «La plus importante étape de ma vie remonte au jour où j’ai rencontré l’éditeur du dépliant Publirama, José Bosange, qui m’a fourni certaines notions de marketing de la presse écrite.» Ambitieux, Henri a donc associé, il y a de cela 12 ans, à la vente de journaux, la réalisation de son dépliant publicitaire. «J’ai lancé en 1999 le premier numéro de Publikis pour venir en aide aux activités économiques de Kisangani», raconte-t-il.
Limitée par le manque de moyens financiers, sa publication n’est cependant pas régulière. «Par manque de culture publicitaire, les opérateurs économiques de la ville s’intéressent peu à ma publication. Depuis 1999, Publikis en est seulement à son 37ème numéro…» Il en faudra certainement plus, là aussi, pour décourager cet amoureux des journaux.
Moustapha Moulonda