De plus en plus de femmes au foyer retournent aux études
De plus en plus de femmes d’un âge avancé reprennent des études professionnelles ou universitaires, courageusement et sans honte, après des années passées au foyer ou dans de petits emplois. Elles sont soucieuses de contribuer au développement de leur pays et d’améliorer les revenus de leur famille.
Après dix, vingt ans, voire plus passés à travailler dans un service sans promotion ou à rester au foyer, attendant le maigre salaire du mari qui ne suffit pas toujours à joindre les deux bouts du mois, des Boyomaises se remettent aux études. Elles veulent trouver un emploi, ou passer à un échelon supérieur pour celles qui en ont déjà un, et ainsi subvenir aux besoins de la famille. Aujourd’hui, c’est devenu courant et des femmes d’une cinquantaine d’années n’ont plus honte d’étudier aux côtés de jeunes étudiants ou même d’élèves.
A 52 ans Marie-Jeanne Molondawezegi, secrétaire à la banque La cruche qui a travaillé pendant 23 ans à la Nouvelle Banque de Kinshasa, est actuellement étudiante en deuxième graduat à l’Institut Supérieur de Commerce (ISC). Trente ans après avoir raté son diplôme d’Etat, elle a obtenu son baccalauréat. «La connaissance du français et la faculté de vite comprendre ont concouru à ma réussite. Jamais je n’ai tenu compte des ragots qui se disaient autour de moi, explique-t-elle. Je terminerai les deux cycles pour donner le meilleur de moi-même dans mon travail et mieux gagner ma vie.»
S’épanouir
Certaines d’entre elles souhaitent aussi se venger des multiples infidélités de leurs conjoints sous prétexte qu’elles ont un bagage intellectuel très bas et ne contribuent guère au budget de la famille. D’autres étudient pour être en phase avec le rang social de leur mari, pour l’honneur ou pour suivre ce que font d’autres. Mais pour la majorité des femmes, l’objectif est de contribuer au développement de la société et de leur famille et de s’épanouir.
Le pourcentage des filles inscrites à l’université ne cesse ainsi de croître, jeunes et plus âgées confondues, elles représentaient 22% des étudiants en 2008 et sont estimées à 31% cette année. Les responsables des différents centres de formation professionnelle et d’autodidacties (centre qui permet aux personnes ayant dépassées l’âge scolaire de présenter les examens d’Etat) constatent la même évolution.
La plupart de celles qui passent le Baccalauréat choisissent la Pédagogie générale, plus facile. D’autres, qui ne le passent pas, font l’Institut des techniques médicales (ITM) pendant 4 ans puis l’Institut supérieur des techniques médicales (ISTM) afin de devenir infirmières. Les Femmes chrétiennes catholiques (FCC) essaient d’attirer aux études celles qui en sont capables et apprennent à d’autres la cuisine, au tissage et tricotage. Elles ont même créé quatre écoles d’alphabétisation.
Aujourd’hui, grâce aux diplômes obtenus, certaines femmes occupent des postes intéressants et plusieurs sont cadres dans les entreprises publiques et privées.
Courage et compétence avant tout
Afin d’en arriver là, elles doivent faire preuve de beaucoup d’énergie et de courage pour affronter les moqueries, voire les insultes, la jalousie, le découragement des proches, assumer en même temps les tâches ménagères et le rôle de mère et d’épouse, le travail au service pour certaines. Régine Bulaya, qui a une cinquantaine d’années, qui fut Bourgmestre adjointe de la commune Mangobo et Kabondo de 2000 en 2008, est inscrite à la Faculté des Lettres au département d’histoire politique en première licence dans l’espoir de poursuivre la carrière politique qui la fascine tant : «Je ne me suis pas découragée et je me bats tous les jours pour que ça marche.»
La plupart des époux soutiennent et encouragent leurs épouses à tenir bon car ils comprennent que les temps ont changé et qu’à deux il est plus facile de s’en sortir financièrement. Francis Kadolo, qui a épousé une licenciée soutient «qu’il est plus bénéfique de prendre une femme qui a étudié, même si elle ne contribue pas financièrement parce que les études ouvrent aussi l’esprit.»
Pour celles qui travaillent, les études sont faciles car, disent-elles, elles retrouvent dans les cours ce qu’elles font déjà à leur poste. Les femmes sont aussi très assidues comprenant l’importance de ces études. Certaines se font même encadrer à la maison pour assurer leur réussite sans corruption ni tricherie ou passe-droits sexuels.
Nadia Mideso