Des prêches dans les radios aggravent les problèmes des gens

Publié le par journalmongongo.over-blog.com

Les prédications dans les médias de nombreux pasteurs, qui promettent des miracles et la prospérité à tous, causent de graves dégâts dans la société. Des malades arrêtent de se soigner, certains attendent la manne du ciel au lieu de travailler… Mais aucune guérison n’est jamais prouvée et l’argent n’arrive pas…

 

Tôt le matin, dès 5 h 30, la plus part de chaînes des radios de la ville sont prises d’assaut par les pasteurs et autres prêcheurs. «Intercession matinale, réveil avec Jésus...», tels sont les noms de ces émissions qui promettent du travail, un mariage, la guérison miracle, la prospérité,…

«La radio nous permet d’atteindre un large public même ceux qui n’ont pas le temps de venir dans nos églises», explique le pasteur Israël Bolimofa, qui prêche du lundi au samedi, depuis six mois, sur les antennes de la radio OPED/FM. Les auditeurs téléphonent en direct ou envoient des textos pour poser leurs problèmes. Le prédicateur, tout en posant des questions, demande alors à l’auditeur de se mettre debout ou à genoux, de toucher une partie son corps, là où il est pour prier.

Certains prédicateurs découragent les malades de ne plus aller à l’hôpital car, disent-ils, Dieu guérit. «Les auditeurs témoignent des miracles ou solutions données par Dieu à leurs requêtes à travers nos prières», ajoute le pasteur Israël Bolimofa. Sans que ces témoignages soient confirmés par des avis médicaux. «Il y a des maladies incurables. L’interruption de la prise des antirétroviraux par les sidéens, par exemple, peut fortement dégrader l’état du malade. C’est fatal !», prévient le docteur Akim Mumeme de l’hôpital général de référence de Lubunga.

Les observateurs s’inquiètent aussi de voir les populations démoralisées et attendre tout de Dieu sans travailler. La religion devient ainsi l’opium du peuple.

D’autres prêtres ou pasteurs estiment ces prédications dangereuses. «Je prêche pour changer les comportements des gens et non promettre les guérisons. C’est suicidaire de refuser de se soigner et d’aller traîner dans des groupes de prière. Prier et se soigner ne sont pas incompatible», pense, le pasteur Charles Lilenga, Directeur de la Radio RTEDI et présentateur de l’émission «méditation matinale». Selon l’abbé Victor Mbatu, «la parole de Dieu est tronquée par des serviteurs qui prêchent selon les attentes, les souffrances des populations et promettent des miracles.». Le Pasteur Jules Alenzo de l’église Bima, estime qu’«enseigner la parole de Dieu en tenant compte des attentes de la population, c’est leur donner la mort».

 

Réglementer le secteur

Dans les médias, les tranches leur sont attribuées gratuitement ou à moindres frais. Pour Rabin Ramazani, ancien directeur de la Radio Liberté, qui avait accordé à quatre Églises un tarif forfaitaire par mois,  «le but était  aussi de remplir la grille des programmes.» Cependant peu de responsables des medias contrôlent le contenu des messages. «On prêche sur nos antennes, mais sous ma surveillance et de l’autorité de l’Église», déclare l’Abbé Célestin Bwanga, directeur de la RTA. Pour le journaliste, Jean Pierre Lifoli, les émissions à téléphone ouvert sont dangereuses car l’animateur ne contrôle pas les intervenants. «Les responsables des médias peuvent être passibles de poursuites lorsque leurs radios induisent les gens en erreur en leur faisant par exemple arrêter la prise de médicaments», précise Alexis Dunia, coordonnateur adjoint de la Haute Autorité des Médias qui plaide pour la réhabilitation des instances de régulation et d’autorégulation.

Cosmas Mungazi

 

Des chambres de prière remplacent l’hôpital

 

De plus en plus de lieux de prière appelés «chumba ya maombi» s’implantent ça et là. Les gens, surtout ceux, qui ont des problèmes de maladie, de travail, de conception, de mariage, s’y précipitent. «Des malades quittent les hôpitaux pour ces lieux», affirme un médecin. Selon eux, leurs problèmes sont d’origine maléfique, seul Dieu peut les résoudre. Près de l’orphelinat, dans une maison inachevée, une cinquantaine de gens, en majorité femmes et enfants sont en prière. «Ils souffrent de sorcellerie, de malaria, du VIH…», déclare Lifaefi Prosper, un des pasteurs.

Dans la commune Tshopo sur la 6ème av, le pasteur Kehita prie lui aussi sur des malades et déclare qu’ «une séropositive a retrouvé sa santé après d’intenses prières, une autre est morte après que sa famille l’ait retirée de ma chambre des prières». Bernard Kasongo, étudiant en droit, confirme être guéri du diabète chez le même pasteur sans savoir que c’est une maladie incurable qui doit être suivie toute sa vie..

Le 27 juillet, lors d’une campagne d’évangélisation à l’esplanade de la Poste, plusieurs personnes ont affirmé avoir été guéries par la prière. Autant de témoignages qui n’ont aucune valeur médicale. En effet, selon le docteur Akim Mumeme, «aucune maladie ne peut être confirmée sans des examens médicaux. De même aucune guérison n’est possible sans diagnostic.» Mais ces fausses guérisons rapportent gros aux pasteurs qui font travailler ces prétendus guéris pour leur compte ou se font donner des biens et de l’argent. Ils payent souvent beaucoup plus cher qu’à l’hôpital…

Cosmas Mungazi

 

 

Publié dans Mongongo 24

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